꩜ Jeu de Passage ( Mix 2003)

Peut-être le mix le plus personnel de tous mes mixs…En plus de musiques proches de mon coeur, je l’ai entièrement brodé de mes captations sonores . Il porte les présences et les voix de mes voyages , de mes sanctuaires… et de mes amis co-créateurs comme Yasuko Tadokoro, Patrick Watson, Katrin Leblond, Sylla Robillard, Fady Zakar, Mohamed Rateni.
Merci à vous .
Merci aussi à Christian Bobin pour poser les mots qui ferment et ouvrent ce voyage.

꩜ “Il y a toujours des traces” . Voix de la Roya (2003)

Carte postale sonore de 2003.

6 minutes de voyage dans la mémoire de l’été 2003 durant lequel j’ai enregistré des histoires et paysages sonores de ma vallée franco-italienne, la Roya.
( Ce mix fait partie d’un plus long voyage sonore, JEU DE PASSAGE. C’est la 7e track du mix )

La Brigue, Juillet 2003. Un DAT contre ma hanche, un micro binaural à la main, entre Jean Pierre et Joseph, j’enregistre le son de la fenaison qu’on entend dans ce mix.
Merci Fabien pour cette forte et unique trace visuelle de cet été-là. J’ai tant de sons et aucune image. C’était avant les téléphones portables perpétuellement dans nos poches…


J’ai composé ce petit mix en 2003 avec mes enregistrements de mon village ancestral, la Brigue, et de ses environs.
On entend les paroles et le chant d’Ido ( la reverbe y est naturelle. Nous étions tous les deux assis dans un ancien blocaus où il s’est réfugié durant la seconde guerre, au dessus du village).
On entend le récit d’Aline et le son des blés fauchés par Joseph, son mari en équipe avec Jean Pierre.
On entend le chant de Fady accompagné de sa kora
On y entend les cloches de l’église de la Brigue et le murmure de la fontaine de San Bastian
Parfois, on entend la respiration haletante de Speedy, le chien de ma tante :)
Et puis les insectes, le vent, … toutes ces traces du vivant.

Une photo de la Brigue. Je n’en connais pas la date, mais comme le nom du village y est encore écrit en italien, probablement avant son rattachement à la France, en 1947 .

2003-2022. Un peu de l’histoire derrière ce mix. Un peu de l’histoire sur mon appel à le retrouver dans mes archives et à le partager maintenant.

Juillet 2003:
J’ai passé le mois de juillet 2003 au village de mes ancêtres, la Brigue, dans la vallée de la Roya. Mon ami musicien et sound designer Luc Martinez et moi étions invités à faire des captations sonores pour le Musée local du Patrimoine. 
Ma famille paternelle est originaire de ce village depuis nombreuses générations (tous bergers). Cet été là, remplissant encore mon rôle d’étrangère intime - le fil rouge de ma vie- j’ai passé mon temps à écouter les anciens me conter la vie d’antan dans ces alpes méditerranéennes. Me dire la dureté de la seconde guerre sur cette ligne frontalière franco-italienne et son issue bouleversante puisqu’en 1947 le village et quelques autres de la vallée ont littéralement changé de nationalité, passants d’italiens à français… Beaucoup d’histoires puissantes qui m’ont été offertes cet été là… souvent accompagnées par des verres de génépi maison, prompt à délier le flow des souvenirs.
Ce village, cette vallée, ces montagnes, ce sanctuaire rayonne d’une grande force d’attraction. Constamment, il attire des êtres aux ondes-mondes qui lui ressemblent. Comme mon ami musicien Fady Zakar rencontré cet été 2003, qui m’a offert ce chant à la kora posé dans ce petit mix.

Octobre 2020:
Une énorme tempête a détruit la vallée de la Roya et sa jumelle, la Vésubie. Les plus infimes ruisseaux sont devenus des autoroutes. De toutes parts, les eaux ont traversé, emportant vers la mer, 60 kms plus bas, maisons, routes, vies humaines, vies animales, vies végétales. Depuis ce 2 octobre 2020, le paysage des vallées est autre. Paysage géographique. Paysage social. Paysage matériel. Paysage émotionnel.
La catastrophe a ouvert des plaie et des nouveaux chemins. Beaucoup ont quitté la vallée. D’autres ont décidé d’y revenir, de s’y installer, d’insuffler à ces lieux la vie et l’attention qu’ils appellent depuis longtemps .
L’étymologie du mot “ catastrophe” indique un “changement de direction”.

Juillet 2022 . Maintenant:
Je retrouve ma vallée et mon village après 3 ans d’absence, parce que frontières fermées, etc.
À mon tour de découvrir cette nouvelle géographie . Les plaies toujours ouvertes et les cicatrisations en cour. Comme tout le monde, je suis moi aussi forcée de mettre mes souvenirs au présent. Certains de mes espaces d’enfance, terrains de jeu de générations en générations, sont rayés de la carte. La nostalgie se pointe souvent. Je la respecte, la laisse me traverser et choisi de ne pas l’habiter. Un nouveau temps a commencé. Ici et partout. On le sait bien. Au moins, on le sent..

En effet, l’univers me propose clairement de mettre l’histoire Présent. En moins de 24 heures, j’ai retrouvé Fady et Aline, deux êtres dont les voix co-habitent ce mix et qui pourtant ne se connaissent pas. Je ne les avait pas retrouvé sur ces terres depuis 2003. Et hop, jaillissant sous mes yeux , un cycle de 19 ans!
Ido et le chien Speedy sont morts depuis. Joseph le mari d’Aline, lui aussi a rejoins l’invisible. Aujourd’hui, Aline m’a appris que la tombe de Joseph avait été emportée par la tempête de 2020. Le cimetière longeait la rivière. Il est lui aussi parti vers la mer. Aline m’a dit combien c’était dur durant ces deux dernières années de ne pas pouvoir se recueillir sur la tombe de celui qu’elle appelle toujours “ son grand amour”, de l’imaginer partout et nulle part dans la rivière qui descend la vallée. Tellement dur qu’elle a longtemps renoncé à venir au village. Aujourd’hui, elle m’a dit qu’enfin, elle parvenait à mieux vivre à la Brigue, là où ses enfants et petits enfants continuent à faire pousser la vie. Aline ressent la présence de Joseph au-delà de sa tombe. Dans l’âme du village, dans les montagnes. Partout . 
Comme elle me disait 19 ans plus tôt, “il y a toujours des traces“.

Une des traces qui marque le passage de la tempête dans la vallée Roya. L’eau est montée si haut…

Tombe de mes arrière grand-parents Franca, bergers.

Moi et mon arrière grand père Eugène Franca, dit Barba Geni, le doyen du village qui a quitté cette vie quelques mois avant ses 100 ans.




👄 Broder le jumeau sauvage: Un conte & un rituel


Je vous raconte ici ma version du conte scandinave
Courting the wild twin.


J’ai découvert ce conte dans l’anglais rocailleux du Dr Martin Shaw, un storyteller du Devon en Angleterre.
C’était au printemps 2020, alors que notre monde s’ombrageait d’une force nouvelle, mystérieuse, inquiétante. Une force sauvage.

Dès la première écoute, j’ai senti que ce conte ancien arrivait à point ‘maintenant’. Il offrait plusieurs chemins pour réfléchir le présent. Au carrefour de ces chemins se tenait un rappel: chacun de nous est né avec un jumeau, ou une jumelle. A twin. Mais, ce twin, parce qu’il ne correspond pas aux critères acceptables (de la famille, de l’école, de la societé…) - trop intense, trop sensible… trop different - ce twin se fait mettre à la porte. Exilé. Bye-Bye.
Et on en parle plus, si possible!

Alors on grandit sans son jumeau.
On grandit bien. On grandit sage. Propre, entouré. Chemises blanches.
Pendant ce temps, notre jumeau grandit seul. Mode instinct. Mode survie. Chemise rouges, terre et sang. De plus en plus cru, le jumeau. De plus en plus sauvage…et évidemment, de plus en plus hostile.  Parce que “ce qu’on exile devient hostile”. À cause du manque .

Et puis, dans ce conte comme dans la vie, arrive ce fameux Jour : le jour où le jumeau décide de revenir à la maison, parce que maintenant ça suffit ! Il EXGIGE sa place et ses droits. Il veut être vu et entendu et reconnu comme membre entier et légitime de la famille. Il veut être AIMÉ, tel qu’il est, maintenant! Et il est furieux. Il veut tout détruire. Comme il a du se construire seul, il est devenu tellement fort qu’effectivement, il pourrait bien tout détruire!

C’est là que le conte nous donne une clé: un acte magique pour charmer le jumeau.
Un soin par la Beauté pour réparer l’Humain.
Une prière fidèle pour réunir ses forces, blanche et rouge. Sage et sauvage. 
Un acte pour se re-trouver, complet

Si ton jumeau sauvage hurle pour revenir maintenant, ce conte est pour toi. 
Découvre l’acte magique, parmi d’autres secrets pour éduquer ton coeur.
Rappelle à toi tes membres. Re-membre toi .
Remember. 
Rappelle toi qui tu es.
Au complet. Dans toute ta puissance et ta souveraineté.

Écoute …

20170916_130426_9866-jpg_med.jpg

La jumelle sauvage


… et pour cheminer avec le conte
voici ci-dessous quelques questions que j’offre aux auditeurs après l’écoute.
Des questions vers lesquelles on peut revenir encore et encore …


CHARMER LE JUMEAU SAUVAGE
Transcription du conte
d’après la version anglaise du Dr Martin Shaw

Il était une fois, au coeur d’un royaume, une reine et un roi. 
C’étaient des bonnes personnes, des gens généreux. 
Ils s’aimaient, ils aimaient leur royaume. 

Mais la nuit, quand ils se couchaient, il y avait cette ombre qui planait entre eux. Comme un chagrin silencieux.
Ce chagrin était très simple: la reine ne parvenait pas à avoir d'enfant. 
Depuis longtemps, ils essayaient et rien n’avait fonctionné.

Un matin, la reine comme à son habitude se promène dans les jardins du château.
Mais ce jour là, répondant à une étrange impulsion, elle décide de quitter les pelouses bien taillées du château.
De passer le portail au nord, derrière les jardins
et de s’aventurer en la direction de vieille forêt profonde…

À peine elle en passe le seuil de la foret, que du tronc d’un grand chêne apparait …une veille femme.
La veille femme s’adresse à la jeune reine. Elle lui dit : « je vois ton chagrin . 
Je vois bien que, même si tu occupes tes journées à donner autour de toi, ta gentillesse, ton temps
Il y a cet énorme abime dans ton coeur. Je vois ton désir silencieux d’être mère. 

Et je vais t’aider. 

Tout d’abord, il faut que tu comprennes: 
si tu n’exprimes pas ton désir, si tu n’offres à ton désir un écrin de langage, alors simplement il n’existe pas.

Donc, voila ce que tu vas faire.
Ce soir, de retour au château, prend avec toi une petite tasse et pars te promener dans les jardins du nord.
Marche sans t’arrêter jusqu’à ce que la nuit tombe.
Et à chaque pas de ta marche, envois ton désir partout autour de toi. 
Exprime exprime exprime. Dis à voix haute et claire tout ce que ton coeur souhaite.
À la nuit, déverse toutes ces paroles, souffle tout ton désir dans la petite tasse.
Puis retourne la tasse sur le sol, reverse-la directement sur la terre.
Et pars te coucher. 

Demain matin, reviens jusqu’à la tasse et puis retourne-la.
Tu verras. 
Sous la coupe, deux fleurs auront poussé. Une fleur blanche. Et une fleur rouge. 
Tu vas manger la blanche, tu m’as bien compris. La blanche. Surtout pas la rouge! 
Fais comme je te dis, et ton désir se réalisera.

Et sur ces mots, la vielle femme re-disparait dans son tronc, aussi mystérieusement qu’elle en est apparue.


Le soir, la reine fait exactement comme la vieille femme lui a dit.
Une petite tasse à la main, elle marche dans les jardins du nord.
Et pendant qu’elle marche, elle exprime tout son désir à voix haute.
Elle dit, elle dit, elle dit. Tout ce qu’elle n’a encore jamais osé dire. 
À la nuit tombée, elle rassemble toutes ses paroles, tout son désir, et les souffle dans la petite tasse, 

Et hop, 
elle retourne la tasse sur le sol du jardin. 
Et elle part se coucher.

Le lendemain matin, elle court vers le jardin.
En effet, quand elle retourne la tasse, elle découvre la fleur blanche et la fleur rouge qui ont poussé.
Et là, malgré les directives pourtant très claires de la vieille femme, au moment ou sa main va pour cueillir la fleur blanche, la jeune reine ne peut s'empêcher d’attraper la fleur rouge, …et de l’avaler, d’un coup!

Instantanément, la reine sent quelque chose d’évident qui se produit en elle.
Comme une étincelle aux creux de ses hanches
Elle sait . 
Elle sait qu'elle est enceinte. 

En effet, les mois passent, et son ventre s’arrondi…
Et voila, maintenant on est rendu au neuvième mois. 
Le bébé est prêt à naitre.
C’est le soir, dans la plus petite tour du château
Les femmes se sont rassemblées autour de la reine pour chanter les 1000 secrets du passage 
Et alors que la vieille doula accompagne la reine à pousser son bébé dans ce monde,
elle voit sortir d’entre ses jambes, non pas un enfant, mais ….un petit serpent noir. Un genre de ver noir. 
Et son premier réflexe devant cette petite chose visqueuse et bizarre, c’est de l’attraper et de le jeter par la fenêtre. 

Quelques secondes plus tard, nait un beau petit garçon. 
À partir de ce moment, ni la doula ni les femmes présentes, ni personne ne dit mot du serpent.
Comme s’il n’avait jamais existé . Amnésie générale . 
Pourtant…au fond du fond, la doula se souvient bien de ce petit serpent qu’elle jeté dehors, l’envoyant en exil…

Mais pourquoi se questionner alors que l’autre garçon grandit parfaitement.
Il fait la joie de ses parents. Il fait la joie de tout le royaume. 
Un beau jeune prince heureux et câliné.

Tout se passe paisiblement jusqu’à ses dix sept ans. L’âge où il décide d’aller se marier.
Ce jour là, il grimpe sur le superbe cheval blanc offert par ses parents 
Et quitte le château pour aller trouver celle qui sera sa femme.
En traversant la forêt, il arrive à un carrefour.
Là, devant lui, se dresse un GI-GAN-TESQUE serpent noir qui fulmine de rage.
Et le serpent répète en boucle cette phase énigmatique aux oreilles du prince :
« Les frères ainés se marient en premier». 

Le jeune prince détourne son cheval et prend une autre voie. 
Mais ce jour là, à chaque carrefour auquel il arrive, le serpent se tient là et râle sa même phrase:
«Les frères ainés se marient en premier».

Evidemment, le jeune prince fini par rentrer au château pour aller trouver sa mère et son père
et leur demander "Y a-t-il quelque chose que vous ne m'avez pas dit sur ma naissance? " 
La reine et le roi répondent que « non » ( même si à ce moment là, la reine se mord la langue pour ne pas parler de la fleur rouge qu’elle n’aurait du croquer) 
Finalement tous les trois decident d’aller trouver la veille doula. Peut-être qu’elle se souviendra de quelque chose?
Devant leur affolement, la doula finit par avouer que « oui, en effet, ce soir là, il s’est passé cette chose étrange, ce petit serpent noir. Mais comme cette chose n’avait rien à faire là, évidemment qu’elle a lancé par la fenêtre. Et puis de toute façon le jeune prince est né, alors tout était parfait, non?» 

Et bien non. Aujourd’hui, cette petite créature rejetée a grandi en force. Le serpent réclame ses droits, son titre de prince et en tant qu’ainé, il veut se marier. 


Là, il se passe un moment incroyable dans l’histoire.
La reine et le roi disent: «Mais oui, c’est notre fils. C’est le prince. Bien sûr que nous allons l’accueillir au château. 
Et nous lui ferons sa chambre. Il est grand temps qu’il reviennent chez lui ». 
Alors, pour charmer le serpent et le ramener vers le château,
le roi et la reine envoient les plus doués de leurs musiciens, de leurs poètes, de leurs danseurs …
Et le serpent, après ses longues années d’exil revient dans le château de sa naissance.
Immédiatement, ses parents, font savoir dans tout le royaume qu’il y a un prince à la recherche d'une épouse. 
Pas de mention de la « forme » du prince. 
Evidemment, nombreuses femmes répondent à l’appel.
Mais aucune ne traverse vivante sa nuit de noce. Chacune se fait dévorer.
Tous les matins, alors que le roi et la reine vont rejoindre leur fils 
Ils se désolent de ne trouver au sol, qu’un tas dos … et un serpent toujours aussi furieux .

Après un certain temps, le château a acquis une réputation. 
On l'appelle «  l'endroit où vous entrez et d’où vous ne revenez pas ».
Et les futures potentielles princesses ne se pressent plus à la porte.
Alors quelle surprise pour le roi et la reine quand une lettre leur parvient:
Au frontière du royaume, une jeune femme leur répond qu’elle est prête à épouser le prince. 
Mais dans sa lettre, la jeune femme précise ceci : elle veut un an et un jour pour se préparer.
La reine et le roi s’empressent de lui répondre «Bien sûr. Evidemment. Tout ce que vous voulez.» 


Maintenant, vous devriez savoir que cette jeune femme est la fille d'un berger .
Elle a grandi dans les collines et les bois.
Et ce jour là, après avoir répondu oui à ce mariage avec le serpent, elle marche la foret en se questionnant à voix haute. 
«J’épouse un serpent. Qu’est ce qui m’a pris de dire oui à ça ?! Qu’est ce que je dois faire maintenant?  »
Elle s’assoit sur les racines d'un vieux chêne, quand, du tronc sort la vieille femme qui lui dit

«Voilà ce que tu vas faire.

D’abord tu vas éduquer votre cœur.
Pour cela, tu vas préparer douze chemises de mariage - comme des chemises de nuit, mais pour tes noces 
Sur chacune d’elles, tu vas broder de très beaux dessins, juste autour de la région de ton cœur. 
Passe un vrai temps sur ces douze robes. N’en presse pas l’ouvrage et n’en parle à personne.
Tous les jour, fidèlement, reviens à ta tache. Tous les jours, éduque ton coeur. 
Ensuite, le soir de ton mariage, tu vas porter toutes ces robes, l’une par dessus de l’autre.
En plus, ce soir là, emporte dans ta chambre nuptiale deux grands bains.
Un bain rempli d’eau et de cendres et un autre rempli de lait.
Et puis deux brosses à récurer en métal. 
Tu sauras quoi faire ensuite.

Voilà les conseils que je donne. 

Sur ces mots, la vieille femme redisparait dans l'arbre

Une année et un jour passent. 
La jeune femme arrive au château, couverte de ses 12 robes. 
Elle épouse le serpent. 
Alors même que le serpent enroule sa queue autour d'elle, sans aucune panique, elle le regarde et dit:
“Oui, c’est bien mon mari” .

Ils rentrent dans la chambre nuptiale.  
Le serpent dit: «Enlève ta robe.» 
Et la jeune fille répond. “D’accord. J’enlève une de mes robes, si tu enlèves une de tes rangées d’écailles».
Le serpent stupéfait se dit "Personne ne m'a jamais demandé de faire ça avant. Personne ne m'a jamais parlé comme ça » 
Alors il le fait. Et c’est douloureux ! Il cri beaucoup. Il a mal… mais il le fait. Il enlève une rangée de ses écailles. 
Lorsque c’est fait, il dit à la jeune fille «Maintenant, enlève ta robe!.»
Et la jeune fille répond à nouveau. « Bien sûr. Je le ferai si tu enlèves une de tes couches d’écailles».
Vous pouvez imaginer sa fureur.
Heure après heure, couche après couche après couche, robe après robe, le serpent ôte ses écailles…
…jusqu'à ce que finalement, sous cet amas d’écailles, se découvre un petit serpent. Un petit ver noir.
Pas un beau jeune homme.

C’est alors que la jeune femme sort les deux brosses à récurer. 
Elle place le petit serpent dans le bain de cendres et d’eau, et frotte sa chair .
Et s’il avait mal avant, maintenant c’est encore pire. Il hurle!
Mais elle continue.
Une autre heure, elle frotte cet être. Jusqu'à ce qu'en dessous apparaisse … un homme 
Un homme d'une beauté ordinaire. 
Un homme avec le visage de quelqu’un qui revient de l’exil. 
C’est alors qu'elle le porte jusqu’au bain de lait. 
Et peu à peu, doucement, elle le lave, elle le berce dans ce lait maternel.

Et le matin, quand le roi et la reine se présentent, et s’attendent à voir la même terrible scène
Il sont surpris et émus jusqu’aux larmes en découvrant un jeune homme et une jeune femme, enlacés, paisibles, radieux.

À partir de ce moment, le plus jeune frère, lui aussi a rapidement trouvé son épouse.
Peu à peu, les gens du royaume ont recommencé à avoir confiance dans leur château

Ce château, ce royaume existent à l'intérieur de chacun d’entre nous .
À l'intérieur de chacun d’entre nous , 
il y a une femme qui apprend à éduquer son coeur
et un homme qui apprend à enlever ses écailles.

Et voila l’histoire.

Où vous trouvez-vous dans cette histoire aujourd’hui? 
Quel moment, quelle image, quel personnage a capté votre coeur ?
Et qu’allez-vous en faire?

IMG_8984.JPG

🎼 Odetta: The Times They Are A-Changin'

A classic Bob Dylan song, by the American singer, actress, guitarist, lyricist, and Civil rights activist Odetta
Still a song for now.

Come gather 'round people
Wherever you roam
And admit that the waters
Around you have grown
And accept it that soon
You'll be drenched to the bone
If your time to you is worth savin'
And you better start swimmin'
Or you'll sink like a stone
For the times they are a-changin'

Come writers and critics
Who prophesize with your pen
And keep your eyes wide
The chance won't come again
And don't speak too soon
For the wheel's still in spin
And there's no tellin' who
That it's namin'
For the loser now
Will be later to win
For the times they are a-changin'

Come senators, congressmen
Please heed the call
Don't stand in the doorway
Don't block up the hall
For he that gets hurt
Will be he who has stalled
The battle outside ragin'
Will soon shake your windows
And rattle your walls
For the times they are a-changin'

Come mothers and fathers
Throughout the land
And don't criticize
What you can't understand
Your sons and your daughters
Are beyond your command
Your old road is rapidly agin'
Please get out of the new one
If you can't lend your hand
For the times they are a-changin'

The line it is drawn
The curse it is cast
The slow one now
Will later be fast
As the present now
Will later be past
The order is rapidly fadin'
And the first one now
Will later be last
For the times they are a-changin'

🎙 INTERBEING : Meet the brilliant Charles Eisenstein.

Two interviews to meet the “Intelligent Optimist” Charles Eisenstein , an american teacher, speaker, and writer.

He is the author of the books "Sacred Economics" and "The More Beautiful World Our Hearts Know Is Possible,"… Much of Charles Eisenstein’s work deals his thesis that global culture is immersed in a destructive story of separation - and part of his mission is to present an alternative path of interbeing.

🎙Here is A PODCAST (June of 2020) he made in the context of his Esalen’s workshop, about one if his last essay, the Coronation, which deals with America’s societal and governmental response to the coronavirus. ( Read the essay here )

🎙Below, A VIDEO INTERVIEW where Charles Eisenstein answers 12 questions about our present social crisis , offering possible solutions of a new world bursting with beauty and creativity.

The questions and their time codes:

1:06 - What are the 'old story' and 'new story' that you describe in your writing?
14:37 - Where does the sense that a better world is possible come from?
19:16 - What guides us in the space between stories to creating the new story?
21:11 - How did the world get to where it is now?
28:20 - Do you think advancements in technology can solve the problems we're facing?
33:50 - Do you see the current money system as a symptom of separation?
37:50 - What could an alternative system look like? Would the current system need to collapse to make way for the new?
43:24 - Can individual action create big change?
48:14 - What is the wound of separation and how do we see it expressed in society?
54:32 - What do you advise people to do in times of not knowing what to do?
1:01:33 - Can doing nothing take you to a place of knowing what to do? 1
1:06:39
- When you imagine the new story, what does it look like?

🎙Listen to Dr GABOR MATE beautiful and powerful testimony on Israel/ Palestine


” It’s not about what you know. It’s about what you could know if you wanted to find out”


Here is an extract from Russel Brand podcast with Dr. Gabor Maté , an Holocaust survivor.
With a Gabor Mate talks about the present situation ( May 2021) happening in Gaza.
This is from someone with deep connections to the history of this situation.
This is from someone willing to address the roots of this land and its people. Not just about the last 70 years ago. But about the last 2000 years.

This need to be heard, indeed. Again and again. Until we dare to dig deeper and remember.

(Access the whole podcast here )

👄Un CONTE : Les vi(ll)es au carrefour

Écrit le 31 mars 2021. À Montréal.

IMG_8654.JPG

Il était une fois un jeune homme.
Il quitte sa maison. 
La maison familiale
Il s’en va vers les bois
Sur les conseils de sa grand mère
Qui souvent lui disait
« Va, va dans les bois.
Va dans les bois pour que ta vie commence
». 

Alors, ce jour là, armé de son courage 
et armé de sa soif à commencer sa vie 
il suivit le sentier qui s’enfonce dans les bois.
Il a marché, marché, marché 
jusqu’à ce qu’il arrive
devant un grand rocher qui marquait un carrefour.
Et face à ce rocher, le jeune homme se questionne:
Quelle direction choisir ? 
Aller à gauche? Aller à droite?  

Et comme la nuit tombait
le jeune homme s’est dit « Demain ».
« Demain il fera jour. Demain je choisirai ».
Et puis, le lendemain, alors qu’il se réveille, 
il voit un homme âgé arriver au carrefour.
Lui aussi, il hésite. 
Quelle direction choisir?

Les deux hommes se saluent.
Discutent des chemins. 
Celui qui va à gauche, peut-etre qu’il va là -bas?
Ou c’est celui de droite?
Ils finissent par s’assoir devant le carrefour
Le dos contre la pierre.
Ils partagent leurs questions
Ils partagent leurs doutes 
Ils partagent leurs rêves
Ils partagent leurs repas
Et les deux hommes s’endorment
Jusqu’au matin, où, un groupe les réveille
Des gens qui eux aussi, arrivent au carrefour. 
Et eux aussi débattent 
sur le chemin à prendre.
À droite, à gauche. Chacun à son idée. 
Certain sont fatigués. 
Et s’assoient au carrefour.
Partagent leurs questions, leurs doutes, leurs rêves.
Partagent  leurs repas.

Les nuits, et les jours passent. 
Ils aiment bien être ensemble.
Ils sont bien au carrefour.
Ils organisent leurs vies.
Et sont rejoints par d’autres. 
D’autres en quête d’eux-même.
Qui s’assoient au carrefour pour débattre la question
De la droite. De la gauche.
Les nuits et les jours passent. 
Le campement grandit .
Des maisons, des commerces
École, boulangerie.
On ne voit plus le rocher. 
Les bois sont moins épais.
Des buildings ont poussé. 
C’est devenue une ville
Une ville au carrefour .
Remplie de gens venus pour commencer leurs vies. 
Arrêtés en chemin 
Ce chemin du grand Soi
Arrêtés en chemin par le doute, par l’oubli 
et de belles rencontres.

Une vie au carrefour.
Dans une ville au carrefour.


Et derrière, 
plus loin
toujours

Il y a les bois.

( *Merci Clarissa Pinkola Estes à qui j’emprunte cette phrase )

👁 Un ENTRETIEN avec Jacques Brel & Barbara (1972)

Ces temps-ci, j’ai besoin énormément d’écouter des entrevues comme celles-ci. Avec cette qualité de présence, avec ce rythme humain où la parole vraie peut naitre, et grandir et, faire écho. Peut-être aujourd’hui, allons-nous au plus loin dans les communications artificielles pour faire un tour complet sur nous même. Et retrouver la grâce des échanges véritables. En tous cas, j’aime l’imaginer.

👄 Un CONTE : je vous raconte “L’histoire de la petite main, guérie".

J’ai vécu cette histoire le dernier mois. Je l’ai écris hier soir, en 20 minutes. Et hop, enregistrée direct, avec intro de Wissam:) Un petit conte, vieux comme le monde. Et bien parlant ces temps-ci, me semble ;)
Pour nous et pour nos kids

IMG_8628.JPG

L'histoire de la petite main, guérie.

Il était une fois une petite main qui avait une manie.
Sa manie c’était que, tout le temps, elle pointait du doigt. 
Tout ce qui l’embêtait, elle le pointait du doigt. Immédiatement!
Les gens qui pensaient différemment, pointés du doigt !
Les gens qui n’avaient pas de temps, pointés du doigt !
Les gens qui ne répondaient pas à ses messages, pointés du doigt !
Les gens qui disaient des trucs bizarres.
Les gens qui mangeaient des trucs bizarres.
Les gens qui faisaient ça, les gens qui faisaient pas ça.
Pointés du doigt !

Bon, la liste était trop longue. 
Vous l’avez compris. BEAUCOUP de choses l’embêtaient !
La petite main avait l’esprit critique. 
Et le doigt rapidement dégainé vers l’extérieur.
Tranchant!

( En fait, en secret, pour dire la vérité, 
la petite main avait surtout le coeur très lourd.
Vous me direz « c’est quoi le rapport entre le doigt pointé et le coeur lourd?
D’après moi, que c’est une question de déplacement de la masse vibratoire.
Mais bon, ça prendrai des calculs mathématiques. Alors ça sera pour une autre histoire.)

Donc revenons à la petite main .

Un beau jour d’hiver,
pendant sa promenade préférée,
La petite main s’est tranchée sur un pic rouillé.
Schlack! 
Là, juste à l’embranchement des doigts…
Et pendant que le sang s’écoulait dans la neige 
La plaie ouverte a délivré un message magique.
D’un coup, la petite main, dans son âme, a entendu la voix de sa grand mère aimée .
Et sa grand mère lui disait: 
« Regarde. 
Quand tu pointes quelqu’un du doigt,
3 de tes doigts sont dirigés vers toi.
Tu vois? 
Il y a 3 fois plus de doigts qui vont vers toi!
Il y a 3 fois plus de choses qui t’embêtent de toi, dans toi, dedans!
Tu vois ? 

Alors maintenant, voila ce que tu vas faire. 
Tu vas refermer toute ta petite main. 
Et tu vas prendre le temps de la soigner.
Tu vas prendre le temps d’écouter, de regarder, de discuter
avec ces 3 petits doigts pointés vers toi. 
Et quand tu sera guéri, au printemps,
alors tu pourra ouvrir toute ta petite main. 
Comme le fleurs s’ouvrent à tous et au ciel.
Et tu pourras serrer avec tout  tes doigts, avec tout ton amour.

Et c’est exactement ce que fit la petite main. 
Et elle a guérit.
Bon quand même, des fois, la manie du doigt pointé lui revient
Mais heureusement, l’histoire de sa grand mère, elle aussi, lui revient!
Et pour un temps, par soin, 
pour elle et pour les siens,
par soin,
la petite main se ferme pour mieux se re-ouvrir. Et puis pour mieux serrer.

Et toi, comment va ta petite main? 
Si tu as le doigt bloqué, 
rappelle toi de ce remède !
Ce remède de grand mère
Il fonctionne plutôt bien.

FIN